2021 un millésime fortement impacté par les aléas climatiques

Les détails du millésime 2021.

Janvier 2022

Un automne et un hiver déficitaires en précipitations, suivis d’un débourrement précoce :
Pas tempête Gloria cet hiver 2021 accompagnée de crues mais à l’inverse un déficit en précipitations considérable : 175mm enregistrés à Perpignan entre début octobre 2020 et fin mars 2021 contre 400mm en moyenne sur la même période.
Après un mois de janvier plutôt froid, la douceur de février et mars a provoqué un débourrement de la vigne plus précoce de 7 jours environ par
rapport à la moyenne des 20 dernières années.

Un épisode de gel inhabituel dans les Pyrénées Orientales :
La nuit du 7 au 8 avril a vu les températures descendre en dessous des -2°5C, température critique pour le gel de printemps. Gelée blanche ou gelée noire, il est difficile de se prononcer précisément tant les dégâts ont surpris par leur répartition spatiale. Les deux types de gelée blanche (par rayonnement) et noire (par déplacement de masse d’air froide) ont
probablement frappé de façon concomitante.
Les dégâts, localement importants avec jusqu’à 80 à 90% de perte, s’avèrent fort heureusement réduits à l’échelle du département,
contrairement à bien d’autres régions. La taille des parcelles gelées, plus longue en raison d’un développement hétérogène de la végétation est en cours. Quelques coursons sont restés sans pousses. On observe dans ce cas particulier, des lésions sur les tissus vasculaires qui conduisent la sève.

Un cycle végétatif encore marqué par la sècheresse :
A l’inverse du printemps 2020 où l’on avait relevé plus de 250mm de pluie entre les 18 et 25 avril par endroit, les mois d’avril et mai ont été frais et secs, faisant perdre notamment l’avance sur le cycle constaté au débourrement.
Cette sècheresse s’est accentuée jusqu’au début septembre mais n’a pas, fort heureusement, été accompagnée de températures caniculaires pendant la période estivale.

Les caprices du Grenache noir :
Avec les températures très élevées des 12 et 13 juin, bon nombre de ceps ont vu leur production fondre, suite à des phénomènes de coulure.
Une forte hétérogénéité intra parcellaire ayant été observée, il est raisonnable d’avancer que cette coulure « climatique » est certainement à
associer à une coulure physiologique, celle-ci provenant d’une mise en réserve insuffisante après la récolte 2020, généreuse sur ce cépage.

Des pluies mal venues dans les terroirs précoces :
Alors que les vendanges avaient débuté depuis quelques jours par la récolte de cépages destinées à l’élaborations de vins blancs et rosés, des pluies orageuses ont fortement impactées les terroirs les plus précoces où les cépages noirs destinés à l’élaboration de vins rouges poursuivaient leur maturation.
D’un millésime à petites baies et faibles rendements en jus avec quelques parcelles marquées par le stress hydrique, la situation changea radicalement avec un important grossissement des baies et une fragilisation de l’état sanitaire liée à des humidités persistantes.

Un suivi rapproché de l’évolution des fins de maturations :
Trouver un bon équilibre entre maintien de l’intégrité de la baie et maturités suffisantes des pulpes, des pépins et des pellicules est un des
points clés de la maîtrise de ce millésime. Le tri de la vendange à la parcelle et au chai a été mis en œuvre dans bien des situations où la valorisation du raisin le permet. En quelques jours la gestion du stress hydrique a été relégué au second plan même si certains
raisins non encore vendangés, dans des secteurs précoces sont restés marqués par le manque d’eau des mois écoulés.

Des fermentations souvent languissantes :
Les pluies et humidités de ce début septembre ont favorisé le développement d’une flore indigène abondante à la surface des baies.
La qualité de la préparation des levains s’est avérée déterminante pour le bon déroulement de la fermentation alcoolique jusqu’à son terme.
Les écarts dans la préparation des levains, la maîtrise des températures, les apports d’oxygène ont eu des conséquences parfois importantes avec des fermentations languissantes ou des arrêts, des départs en fermentation malolactique trop précoces ou encore des développements de Brettanomycès bruxellensis intempestifs.

De belles réussites en blancs et en rosés :
Avec une récolte plus généreuse qu’en 2020, les Macabéo ont agréablement surpris par la finesse des vins.
Les cuvées de Muscats à petits grains et d’Alexandrie, vendangés avec le bon rapport sucres – acidités présentent des palettes aromatiques très riches.
Les Grenaches blancs et gris, avec des productions plus faibles qu’en 2020 demeurent des valeurs sûres dans nos terroirs.
Les autres cépages blancs, Chardonnay, Viognier, Roussanne et Vermentino ont donné des vins bien équilibrés, avec de belles expressions
variétales.
Les parcelles de Grenache noir dédiées à l’élaboration de rosé ont donné des vins avec des arômes délicats et un bon volume en bouche pour autant que la sélection des moûts en sortie de pressoir ait été faite précisément.

Les terroirs « tardifs » à l’honneur avec les vins rouges :
« La patience est la vertu des forts » (Emile
Gagnon).
Cette citation a souri à bon nombre de vignerons dont la patience a été récompensée : en effet les maturations ont pu se dérouler plus complètement grâce à une météorologie plus clémente. De belles cuvées de Syrah, Carignan et Grenache noir ont été élaborées dans ces terroirs : des vins aux arômes de fruits murs, pleins en bouche, aux tanins enrobés.
Malgré tout, la tendance générale sur ce millésime, reste, pour les vins rouges, sur des cuvées moins riches en alcool, des vins plus frais et moins solaires.

Un important travail d’élevage et d’assemblage :
« Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage. Polissez-le sans cesse et le repolissez – Ajoutez quelquefois, et souvent effacez. » (Nicolas
Boileau)
Cette citation se justifie pleinement, pour ce millésime, tant le travail d’élevage quelle que soit la couleur revêt une importance capitale. De même tous les essais d’assemblages réalisés par Synergie Lab, mettent en évidence la très grande précision nécessaire dans leur réalisation, tant les profils évoluent à quelques dizaines de litres près.

Conclusion :
Avec environ 500 000 hl de production attendue et un rendement moyen voisin de 26hl/ha, la récolte 2021, nous ramène à ce que le département produisait entre 1860 et 1869 ! On est bien loin des plus de 4,6 millions d’hl
produits en 1934 sur plus de 71 000ha pour un rendement moyen de 65hl/ha environ.
Dans ce contexte inédit, le monde vigneron doit
impérativement s’adapter. Au vignoble, les choix de cépages et de pratiques culturales (optimisation de la ressource en eau, maîtrise des adventices, …) sont désormais conditionnés par les évolutions climatiques. Il en est de même au niveau du chai, dans les choix de vinification et d’élevage.

2020 : un millésime exceptionnel

Le millésime 2020 expliqué en détails.

Janvier 2021

Un hiver tempétueux et doux :
L’année commença par le passage de la tempête GLORIA en janvier, accompagnée d’énormes précipitations, de 300mm localement, et de crues des principaux cours d’eau. D’importants dégâts fort heureusement localisés sont à déplorer sur des parcelles envahies par les crues. On ne comptait pas les chemins et les vignes ravinés. Après cet événement d’une rare violence, l’hiver fut doux avec par exemple en février une température moyenne supérieure de 3,5° à la normale saisonnière. Le réchauffement précoce des sols associé à une bonne humidité a provoqué les premiers pleurs de la vigne très tôt, signe du réveil des ceps. Cette douceur persistante provoqua un débourrement de la vigne très précoce, le plus précoce de ces vingt dernières années selon le référentiel de la Chambre d’Agriculture des Pyrénées Orientales.

Ce qui suivi relève du jamais vu de mémoire de vigneron :
Avec un mois de mars et un début avril cléments, les processus de minéralisation et d’assimilation des éléments, azote et fer notamment, par la plante se mettent en place. Les sorties en inflorescence sont jugées convenables à l’exception des Macabéo. Le cycle végétatif 2020 s’engageait donc plutôt sous de bons hospices, sauf que le ciel allait nous tomber sur la tête. Plus de 250mm de précipitations par endroit entre les 18 et 22 avril, suivis de 5 épisodes pluvieux jusqu’à la fin du printemps, plusieurs jours consécutifs d’humidité début mai, la Tramontane aux abonnés absents, autant d’événements climatiques qui ont marqué la période avec d’énormes répercutions sur la pression parasitaire et notamment le mildiou. Du jamais vu de mémoire de vignerons, au-delà de 1988, année mémorable en Roussillon en raison des pertes de récolte causées par ce même parasite.

Des fortunes diverses :
Que d’efforts entrepris par les plus courageux. Des démarrages très précoces dans la protection des vignes, des cadences de traitements réduites, des produits phytosanitaires adaptés à la situation et appliqués dans le respect des règles de la pulvérisation ont été les clés de la réussite
dans la maîtrise du mildiou. Rien de nouveau en somme mais la moindre
défaillance s’est traduite en 2020 par un fort développement de la maladie.
Comme souvent en viticulture, l’anticipation et la prévention demeurent les meilleures recettes pour éviter de gros déboires. Les efforts ont été récompensés avec à la clé une récolte abondante chez les vignerons ayant maîtrisé ce premier parasite.

Une course d’obstacle :
Malgré un hiver et un printemps arrosés, malgré un été chaud mais sans excès, dès la mi-juillet, les outils de pilotage de l’irrigation de la vigne, y compris dans des sols profonds, mettaient en avant la nécessité d’une irrigation modérée, irrigation qui s’est poursuivie tard dans l’été en raison d’un temps sec et d’un bon développement végétatif de la vigne. Aussi dans la perspective de conditions à venir plus sèches pendant tout ou partie du cycle végétatif de la vigne, nous insistons une nouvelle fois sur la mobilisation des énergies autour de la réalisation de projets d’irrigation de la vigne.
Si 2019 avait vu l’Eudémis (LOBESIA BOTRANA) plutôt discret dans le vignoble, il n’en fut pas de même en 2020. La pression exercée par ce
parasite a été particulièrement forte dans le secteur des ALBERES et surtout des ASPRES : le recours à des applications fut nécessaire dans des
zones en confusion sexuelle, qui n’avaient pas été traitées en 2019.
Et comme si cela ne suffisait pas, CRYPTOBLABES GNIDIELLA s’en est mêlé, occasionnant ponctuellement des pertes de récolte importantes.

Un démarrage des vendanges précoce pour une récolte historiquement faible :
La précocité notée au débourrement s’est confirmée sur les dates de floraison et de véraison. Ainsi les vendanges ont débuté avec quatre à six
jours d’avance sur 2019 environ (source CA 66), confirmant cette tendance lourde de démarrages de plus en plus précoces de la récolte, liés au réchauffement climatique.
Avec environ 500 000 hl de production attendue et un rendement moyen inférieur à 26hl/ha, la récolte 2020, nous ramène à ce que le département produisait entre 1860 et 1869 ! On est bien loin des plus de 4,6 millions d’hl produits en 1934 sur plus de 71 000ha pour un rendement moyen de 65hl/ha environ.

Les raisins :
Le poids des baies élevé associé à des teneurs en acide malique inhabituellement fortes sont certainement les deux éléments marquants des suivis de maturation.
Le bon déroulement de la floraison et l’abondance des pluies printanières associées à l’absence de canicule et de tramontane desséchante ont contribué d’une part à une bonne différenciation cellulaire des baies et d’autre part à un bon grossissement de celles-ci, conditions nécessaires à des poids de baies plus élevés.
Le bon développement du feuillage (les écimages ont été nombreux cette année) ainsi que l’absence de conditions estivales extrêmes ont favorisé la synthèse d’acide malique dans le feuillage et son accumulation dans la baie.
Malgré une canopée importante l’accumulation des sucres dans les baies n’a pas atteint les sommets des millésimes précédents, contribuant à un meilleur déroulement des fermentations.


Et il a fallu s’adapter :

A la vigne pour prendre en compte :

  • L’évolution de l’état sanitaire,
  • L’hétérogénéité des cinétiques de maturation corrélées à la charge par pied,
  • La réalité des profils des raisins et revoir parfois les objectifs de produits.

Au chai en utilisant :

  • La saignées des cuves de vendanges rouges pour rétablir un équilibre plus favorable entre phase liquide et solide,
  • L’encuvage simultané du Grenache noir et de la Syrah pour compenser certains déficits de couleur sur ce premier,
  • Les moyens de chauffage disponibles sur les fins de macération des vendanges rouges pour augmenter le volume en bouche des vins.

Les vins :
Les vins blancs généralement plus frais cette année présentent des palettes aromatiques variés. L’élaboration de vins rosés très pâles a été favorisée par des baies plus juteuse et la récolte généreuse des Grenaches gris et noirs. La palette des vins rouges reste très riche, en fonction des cépages, des niveaux de maturité atteints et des terroirs. La tendance donne pour
ce millésime des vins moins riches en alcool et plus frais, des vins moins solaires. L’élevage de ce millésime si particulier est en
cours. Les essais d’assemblage des premières cuvées de vin rouge mettent en évidence la très grande précision dans la réalisation de ceux-ci au chai
ainsi qu’un travail préalable en amont de mise en suspension des lies et de travail spécifique sur les vins de presse. La maîtrise de l’oxygène dissous pendant toute la phase d’élevage jusqu’à la mise en bouteille sera plus que jamais déterminante quant à l’évolution qualitative des vins conditionnés.

Et il faudra encore s’adapter et innover : 
Dans ce contexte inédit, le monde vigneron saura faire preuve de « résilience » car il connaît notamment les coups durs climatiques. L’adaptation au contexte sanitaire inédit qui perdure va révéler en lui, sa capacité à innover pour valoriser tous les efforts accomplis, en attendant l’arrivée des jours meilleurs.